La terre est une histoire de crime. Un crime sans criminel. Un de ces crimes qui « nous a échappé ». Que le silence a caché. Silence des gens qui ont regardé ailleurs. Maria revient chez elle neuf ans après le crime et découvre que le silence est pire que tous les châtiments.
C’est peut-être cela qui définit le XXe et le XXIe.,  notre regard absent, qui n’a pas vu la fumée dans le ciel de Buchenwald, qui ne voit pas l’Atlantique plein d’Africains morts ou qui fait semblant de ne pas voir.

L’Espagne, les années 90. Une famille en milieu rural. Un secret. Un crime. Un crime sans criminel. Un de ces crimes qui « nous a échappé ». C’est l’histoire du silence d’une communauté, de gens qui ont regardé ailleurs. Maria qui rêvait de liberté a fui cette famille, cette communauté, afin de vivre plus librement. Elle revient chez elle neuf ans plus tard et découvre que le silence est pire que tous les châtiments…

La Terre s’est imposée à nous en 2010 à l’occasion du festival « La scène espagnole d’aujourd’hui ». Irène Sadowska nous a soumis ce texte, trouvant qu’il faisait écho à d’autres pièces et créations de notre compagnie. En effet, La Terre parle d’Espagne, comme Traversée parlait du Brésil et Parfums de plaisir et mort de Taiwan. Or, à chaque fois, c’est bien de nous qu’il s’agit. Ces trois textes ont en commun la lutte contre les autoritarismes, contre « le silence », contre l’invisibilité imposée à certains êtres humains, la mise en question du racisme, du sexisme… Autant de motifs qui inscrivent La Terre dans la continuité de notre recherche, de notre trajectoire et nous n’avons pas pu rester indifférents à la force, l’intelligence, la beauté, la fluidité et le rythme de l’écriture de José Ramón Fernández.

Dans son écriture, nous trouvons cette même volonté qui est la nôtre, de questionner le passé des personnages afin de comprendre leur comportement présent. Ainsi, la relation entre les protagonistes d’une scène va trouver ses racines dans des situations antérieures. Cela rendu visible, on peut anticiper ou élucider l’enjeu dramatique, le rapport entre les personnages.
L’écriture épurée de J.R. Fernández, la présence du conteur en relation directe avec le public, sont des éléments qui trouvent écho dans notre pratique dramatique. En adoptant le jeu frontal, où le public est le partenaire privilégié du dialogue entre les personnages, nous faisons le choix de la sobriété. Pas d’artifice, pas d’excès. C’est le texte et l’interrelation entre les personnages qui constituent le moteur de l’action théâtrale.

De : José Ramón Fernández
Adaptation : Isabel Ribeiro
Mise en scène : Rui Frati

Direction musicale : Toninho do Carmo et Brenda Ohana
Scénographie : Sylvain Barré
Costumes : Telma Rinkes
En scène : Antonia Hayward, Delphine Dey, Leo Frati, Manuela Brazil, Maria Teresa Ferreira, Vincent Vidal, Simon-Pierre Ramon, Sylvain Rouillier